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Le Feu (journal d'une escouade) - 1916 - Henri Barbusse

Si je vous dis : boue, poux, pluie, mitraille, tranchée... vous me répondez : Première Guerre Mondiale, Grande Boucherie, Der des Ders. Bonne réponse ou presque puisque, hélas, ce ne fut pas la dernière...

Henri Barbusse, engagé volontaire au début du conflit, prend soigneusement note pendant deux ans de ce qu'il voit, entend, ressent et expérimente. Au fond des tranchées putrides, au fond des granges humides, veillent, attendent et luttent une poignée d'hommes, son escouade, modeste échantillon d'une classe d'hommes jetée en enfer. Venus d'horizons différents, ces Poilus sont liés entre eux par l'instinct de survie, par la misère de leur condition et par leur solidarité fraternelle de soldats. Ils ont pour (sur)noms Volpatte, Tirette, Blaire, Cocon, Poterloo, Fouillade, Barque, Paradis, Poilpot, Poitron, Salavert, Bertrand, Eudore et Farfadet ; tous sont éreintés, écoeurés, désespérés et apeurés ; tous se sentent pris au piège.

Ce roman, paru en 1916 et couronné dès sa sortie du prix Goncourt, brave la langue de bois et décrit la réalité sordide du troupier. Un naturalisme qui n'a pas plu à tout le monde, étant donnés les enjeux politiques et la propagande pro-conflit de l'époque, mais qui a largement interpellé l'opinion publique, comme il interpelle toujours aujourd'hui le lecteur. Avec l'acuité d'une caméra cachée, le récit, narré par l'auteur-narrateur, déroule en les juxtaposant histoires personnelles et documentaire de terrain. Impossible de ne pas se remémorer les rares images filmées et les photos floues de cette période. Impossible aussi de ne pas ressentir toute l'horreur de ces existences assassinées.

A travers son roman-témoignage, Henri Barbusse donne la parole à ses camarades dans leur argot natif, ce qui rend la lecture colorée à défaut d'être toujours aisée. Ce qui personnellement m'a fait le plus mal à l'estomac en refermant ce livre, c'est de savoir que ces héros de l'ombre n'en étaient alors qu'à mi-parcours de leurs souffrances et qu'il leur faudrait encore subir deux ans de cette vie de chien, moins pour certains... 

Au final, je ne peux pas dire que j'ai réellement apprécié ma lecture, dans le sens "prendre du plaisir" car un récit de guerre ne m'enthousiasme jamais ; de plus, bien qu'assez classique, la plume de Barbusse ne m'a pas renversée d'admiration, mais son sujet est si grave qu'il est évident que ce roman-mémoire - qui n'a pas grand chose de fictif - doit exister et doit être lu pour toute l'humanité qu'il contient. L'humain pour décrire l'inhumain.

Enfin, ce qui a fini de me démoraliser complètement, c'est la conscience que je n'avais personnellement hérité d'aucun - d'absolument aucun - témoignage familial concernant l'expérience de cette guerre que mes arrière-grands-parents ont pourtant vécue. La mémoire s'efface hélas plus vite qu'on ne le croit.

Le Feu (journal d'une escouade) - 1916 - Henri Barbusse
Tag(s) : #Roman historique, #Littérature française, #Goncourt général, #Première guerre mondiale, #Autobiographie
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